Retour sur le Lundi de l’Europe avec Grégory Martin et Cédric Caubert (thème des droits sociaux)
Compte-rendu de la réunion Lundi de l’Europe : « 2017 : adoption du socle européen des droits sociaux – et maintenant ? » avec Grégory MARTIN, Secrétaire Général CFDT Occitanie et Cédric CAUBERT, Secrétaire Général CGT Haute-Garonne.
Le vendredi 17 novembre 2017, lors du Sommet social organisé par la Suède à Göteborg, les chefs d’Etat et de gouvernement, la Commission et le Parlement européens ont proclamé le Socle européen des droits sociaux, traduisant ainsi l’engagement politique des États membres et des institutions européennes en faveur de la dimension sociale de l’Europe. Ce processus avait été initié il y plus d’un an, en mars 2016, avec le lancement par la Commission européenne d’une consultation publique sur un socle européen des droits sociaux.
Ce socle doit servir de cadre de référence pour les politiques sociales et d’emploi aux niveaux national et européen avec pour objectif de relancer la convergence au sein du marché unique. Il s’agit d’une opportunité pour équilibrer les dimensions économiques et sociales du projet européen. La Confédération européenne des syndicats et l’ensemble de ses affiliés, se sont dès lors mobilisés pour que cette opportunité soit transformée en une étape significative dans la construction d’une Europe sociale.
Le Socle européen des droits sociaux repose sur 20 principes clés qui couvrent des champs divers, notamment en matière de compétence législative de l’UE, qui se déclinent autour de trois thèmes :
- Égalité des chances et accès au marché du travail
- Conditions de travail équitables
- Protection et insertion sociales
Détail accessible ici :
https://ec.europa.eu/commission/priorities/deeper-and-fairer-economic-and-monetary-union/european-pillar-social-rights_fr
Parmi les 20 principes, on peut souligner en particulier : l’égalité entre les femmes et les hommes, l’encouragement du dialogue social, un salaire minimum dans chaque État adapté à la situation économique nationale, la lutte contre la situation des travailleurs pauvres ou encore le droit à une protection sociale adéquate et le droit à un logement pour les sans-abris.
Les principes exposés dans le socle concernent des domaines où l’Union Européenne possède clairement une compétence législative (environnement de travail sain ou égalité hommes-femmes par exemple) et des domaines où elle n’a qu’une compétence juridique limitée ou inexistante (logement ou salaires, par exemple).
La proclamation du socle est un instrument institutionnel qui exprime un engagement des institutions de l’UE et, seulement de manière indirecte, des Etats-membres. La proclamation n’est pas légalement contraignante, ce n’est que si elle est utilisée de manière adéquate et en exploitant au maximum ses capacités qu’elle pourra avoir un impact significatif. L’enjeu est donc bien que les principes du socle soient déclinés en droits effectifs pour tous, partout en Europe, par l’adoption d’un plan d’action au niveau européen et dans chacun des États-membres.
Un an après, où en est-on ?
Deux exemples concrets peuvent être mentionnés :
- La Directive sur les travailleurs détachés a été révisée dans un sens plus protecteur (à l’exception notable du transport routier) en mai 2018 par le parlement européen ;
- La Commission Européenne a proposé un texte de directive progressiste sur « l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée des parents et des aidants », avec par exemple la mise en place d’un « congé parental individuel minimal » unique pour tous les Etats membres. Cette directive est toujours en discussion. Elle est actuellement bloquée par le président français à cause de son coût potentiel…
Interventions :
Les pays d’Europe se trouvent dans des situations diverses (et pour certains difficiles), tant sur le plan économique que sur le plan social. La définition d’un socle commun était donc une gageure, qui a été réussie.
On fait souvent porter à l’Europe la responsabilité des efforts demandés aux citoyens de chaque pays (surveillance du budget, réduction des dépenses publiques…), et on masque les interventions positives, qu’elles soient financières ou sociales (subventions de projets régionaux, garantie jeune, Erasmus…) Par ailleurs, la Commission Européenne fait avancer certains dossier (directive sur les conditions de travail, directive vie pro / vie privée mentionnée précédemment…)
Il y a également une autorité européenne du travail qui doit se mettre en place, même s’il y a pour le moment désaccord sur le rôle et le pouvoir qui lui sera accordé
Mais aujourd’hui, l’Europe fait du social pour que le marché fonctionne, et le budget qu’elle y consacre est trop faible pour pouvoir mener de vraies politiques sociales.
Les préconisations de la Commission Européenne sont d’inspirations libérales, en contradiction avec le socle européen des droits sociaux. Tant que l’économie européenne sera basée sur la concurrence, elle aura besoin d’inégalités entre pays.
Concernant le socle européen des droits sociaux : ce ne sont pas seulement l’Union Européenne et les Etats qui sont concernés : les syndicats et la société civile peuvent/doivent également s’en saisir, pour construire le rapport de force démocratique permettant sa concrétisation. Un droit qui n’est pas appliqué ne sert à rien.
Pour cela, il faut des organisations fortes (politiques, syndicales…), pour porter les revendications des masses. Il est facile de dire « ce n’est pas nous, c’est l’Europe » car l’Europe c’est aussi nous !
L’Europe est un combat, ce n’est pas une démarche naturelle que de vouloir avancer ensemble avec tant de pays différents. En France, nous avons déjà pleins de droits, mais on a fait progresser les droits sociaux dans des pays qui n’en avaient pas. L’alternative, c’est soit le consentement à la solidarité, soit le repli identitaire.
Propositions pour les élections européennes :
- Toutes mesures qui peuvent renforcer les organisations syndicales ;
- Un SMIC dans tous les pays d’Europe ;
- Une assurance chômage européenne (qui permettra de lutter contre le dumping social)